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La Piste aux Etoiles!
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3 mars 2007

No limit…!

…notez que par égard pour le lecteur (et piètre tentative pour faire paraître mes posts moins longs !), je choisis aujourd'hui de faire d’un post bien trop long 2 articles « moyen-longs »…

Dans la série « les profs sont nos amis, et tous ensemble au collège nous formons une grande et belle famille », je me suis découvert cette semaine une parenté et même un certain degré d’intimité que j’étais loin de soupçonner avec certains élèves, lol !

balooClasse de 4e, le jeune Balou (oui, rassurez-vous ceci est bien un pseudo !). J’aime beaucoup Balou parce qu’il a toujours le sourire, a une mignonne petite tête et des yeux qui pétillent tout le temps, est un incorrigible bavard mais accepte toutes les remarques avec le sourire, est hyper motivé et intéressé, a toujours le doigt en l’air pour participer, et même parfois sautille sur sa chaise comme un jeune 6e pour être sûr que je le vois bien parce qu’il n’est pas très grand. Balou étant vraiment très sociable et même franchement rigolo souvent, toute la classe l’aime bien. J’ajoute qu’il est de plus un très bon élève, ce qui pour un prof est la cerise sur le gâteau. Un jour que ses camarades l’embêtaient (la sonnerie avait retenti depuis 1 bonne minute et le pauvre n’arrivait pas à récupérer sa trousse que ses voisins se faisaient passer en douce sous la table, et il commençait à désespérer de pouvoir enfin filer en récréation), mi-fâchée mi-amusée je leur intimai : « voulez donc bien laisser mon petit Balou tranquille et lui rendre sa trousse ! ». Las ! depuis le surnom lui est resté (ce qui ne semble pas le fâcher d’ailleurs, même si sur le coup il est devenu tout rouge et a dit aux autres, hilares, qu’ils n’étaient « qu’une bande de jaloux ! et ouais moi je suis le ptit Balou à Madame Bridget ! »), et il n’est pas rare lorsque je l’interroge qu’un élève s’exclame « allez mon ptit Balou ! », ou, si par malheur il est absent, « vous êtes triste Madame que votre ptit Balou soit pas là aujourd’hui ? ».  Hier Balou a eu un mot malheureux (et en même temps c’est toujours très touchant d’entendre un « grand » vous appeler ainsi) ; alors que je passais dans les rangs pour ramasser des fiches, j’oublie sans faire exprès de prendre la sienne et là il m’attrape par le bras et me tend sa fiche en me disant « Tiens Maman ! ma fiche ! ». Le mot à peine prononcé, il devient tout rouge et balbutie, confus « euh, non, jveux dire Madame ! j’ai bien dit Madame ! ». Trop tard ! toute la classe se marre, et Yoyo, mort de rire, s’écrie : « ah ben ça y est tout s’explique ! c’est pour ça que t’es son ptit Balou à la prof ! ». Pauvre Balou ! je crois qu’il n’a pas fini d’en entendre, surtout que, me sentant d’humeur mutine, à 2 minutes de la fin du cours, et après avoir permis à la classe de ranger ses affaires, je dis à « mon ptit » avant qu’il ne parte en récré : « il pleut aujourd’hui Balou, alors surtout couvre-toi bien ! attention hein, je te surveille ! et sois bien sage dans la cour ! »…

babyClasse de 3e Insertion, Chris ,16 ans. Chris est un gentil gamin souffrant malheureusement d’un gros manque affectif (il ne voit plus sa mère qu’épisodiquement depuis qu’elle s’est tirée avec son amant alors qu’il était encore tout petit),  et surtout d’un manque total de limites. En clair, il a tendance à parler aux adultes (aux femmes surtout) d’égal à égal, et souvent de manière très familière voire déplacée, sans même se rendre compte que cela ne se fait pas. Il a aussi la fâcheuse habitude lorsqu’il vient me parler au bureau de s’approcher très très près jusqu’à limite me frôler, si bien que je dois à chaque fois le faire reculer et refixer des « distances de sécurité ». Malgré ses 16 ans (âge « bête » par excellence chez les garçons) et son côté « collant »,  Chris est un garçon agréable et sympathique et les choses se passent plutôt bien avec lui. Certes je dois fréquemment le faire taire quand il se lance le lundi dans le récit toujours très détaillé de ses agapes du weekend en lui rappelant que je ne suis pas censée entendre ou connaître tous les détails de sa vie en dehors du collège (il fait du rugby, alors si j’ai le malheur de le laisser faire, j’ai droit à l’intégrale de l’après–match, des batailles de serviettes dans les vestiaires à la 3e mi-temps bien arrosée et ses fâcheuses conséquences), mais au moins n’est-il ni agressif ni violent.

Le problème est qu’il ramène tout à l’affectif, et que comme les limites prof-élève (ou même adulte-ado) lui sont très floues, il se permet parfois des propos ou des attitudes que je ne peux admettre. Ainsi l’autre jour, n’ayant pas écouté la consigne et donc ne comprenant pas pourquoi je leur demande en même temps de prendre telle fiche plus telle autre, il s’écrie « woua ! woua ! woua ! oh la on se calme ! ». Sèchement je lui demande à qui donc il s’adresse sur ce ton et en ces termes, et ajoute « pas à moi j’espère car je ne suis pas ta copine mais ton professeur ! ». Tout penaud, il se radoucit et répond : « ah ben excusez-moi alors ! j’ai dépassé les bornes là ? mais j’vous parle comme ça parce que j’vous aime bien, c’est pas méchant ! ». Je le sais bien, le lui dis (pour le rassurer), mais lui rappelle que ce n’est pas approprié. Il semble avoir compris mais 5 minutes après il revient sur une partie de mon discours qui l’a visiblement chiffonné : « vous zavez dit « j’suis pas ta copine » , ben pas ma « petite » copine je sais mais moi je croyais qu’on était grands copains tous les deux ! moi qui dis partout « ouais ma prof d’anglais c’est une meuf à la cool ! », j’suis déçu là ! ». Et le voilà de bouder !!!! J’ai bien passé 10 minutes à lui « remettre les idées en place », calmement et sans m’énerver, parce que sinon il se serait encore plus braqué et ne m’aurait même pas écoutée. Quand on pense que dans cette classe ils sont au moins 4 garçons (sur un demi-groupe de 10 !) à fonctionner comme lui, je vous laisse imaginer ce que ça donne quand ils décident de faire leur caprice tous les 4 en même temps ! et je ne vous parle pas des séances où je ne peux pas rester plus de 2 minutes à corriger le travail de l’un sans que les 3 autres m’appellent en geignant (« et moi alors ? c’est bien aussi ? vous avez dit à Chris qu’il a été sage, et moi aussi j’ai été sage ? pourquoi vous me le dites pas aussi alors ? et même si j’ai bavardé vous m’aimez quand même bien ? etc… ») ou pire se lèvent carrément pour venir en cercle autour de moi, certaines heures j’ai l’impression que c’est sans fin. C’est dans ces moments-là que je me rends compte qu’il est loin le temps où le prof était juste un « transmetteur de savoir et de connaissances presque déshumanisé ». Avec mes 3eI, je suis souvent assistante sociale, parfois infirmière (« j’ai pas mangé ce matin, j‘suis fatigué, j’ai mal au ventre, pourquoi ? », « j’crois j’ai de la fièvre, vous voulez pas toucher mon front ? ». …) ou psychologue, beaucoup maman ou nounou, grande sœur, confidente malgré moi (copine non ! je m’y refuse même si cela oblige au recadrage permanent des distances, du ton, des termes à employer…au point d’en devenir usant certains jours), mais prof d’anglais (ma « fonction » première pourtant !) bien accessoirement dans le fond. Et pourtant, je ne m’imagine pas lâcher cette classe l’an prochain pour la laisser à quelqu’un d’autre …

Mais pour en revenir à Chris, son expression favorite du moment, chaque fois que je le rabroue, ne lui répond pas assez vite ou ne veux pas venir à côté de lui pour voir son cahier, c’est « eh ben puisque c’est comme ça vous êtes plus mon idole ! ». Si je lui réponds que ça m’arrange parce que ce n’est de toute façon pas bien glorieux d’être son idole, et qu’il se comporte comme « un gros bébé », il se vexe et boude, mais jamais bien longtemps…il ne faudrait pas que pendant ce temps-là l’un de ses copains n’en profite pour prendre sa place et accaparer mon attention !

Depuis le début de l’année, tous les vendredis invariablement, Chris se lamente qu’il sera tout seul chez lui samedi soir (quid des parents, père et belle-mère ?), et inévitablement j’ai droit à : « Madame ! vous seriez libre samedi soir pour venir faire du baby-sitting chez moi ? j’suis tout seul j’aimerais bien que vous me gardiez… ». « Tu es un peu grand pour avoir besoin d’une baby-sitter, tu ne crois pas ?, et puis de toute façon je ne suis pas libre ! ». A quoi il osa me répondre un jour, sourire espiègle et regard brillant : « ben justement comme je suis grand maintenant on pourrait jouer à des jeux de grands ! » (sanction : mot dans le carnet pour propos déplacés et sévère rappel à l’ordre conjoint de sa prof principale et moi-même). Non mais ! où va-t-on si les élèves se mettent à me faire des propositions indécentes ? Mais comme il a décidément de la suite dans les idées, si je le « gronde » le vendredi (comme hier quand il s’est cru autorisé à me parler comme à ses potes de rugby), il prend son air de chien battu (la larme à l’œil, la truffe humide ou presque !) et commente tristement : « ça veut dire que vous viendrez encore pas me baby-sitter ce weekend alors ?… ».

Bon allez, je crois que j’ai assez bavassé sur ce blog pour aujourd’hui ! Retournons à nos copies !

Bridget, « prof à la cool »…

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